jeudi 27 mai 2010

Ommm Hai God

Comme je vous l'ai promis la semaine dernière, nous continuons aujourd'hui notre visite de Kobe ! Je vais vous emmener en effet à Ikuta-Jinja, n'ayez pas peur ça fait pas mal.

Ikuta-Jinja est un des plus vieux temple de la plus ancienne religion du Japon : le shintoïsme. Comme je vous l'avais déjà décrit dans un de mes articles précédents, la visite d'un temple shintoïste est toujours un moment bien agréable, ne serait-ce que parce qu'on garde cette impression d'être dans un endroit naturel, et ce malgré le caractère pourtant très spectaculaire des splendeurs que l'on admire.



A propos de spectaculaire, comme on peut le voir sur cette photo et sur celles qui suivront, la couleur rouge vif de ces édifices est ce qui est le plus frappant au premier abord. Mais ces temples réservent aussi à ceux qui s'y intéressent d'autres surprises cachées. Ayant un peu révisé mon manuel du shintoïsme pour les nuls, je vais donc essayer de vous faire partager ce que j'ai pu apprendre ou découvrir de ces lieux sacrés.

Pour décrire les choses dans l'ordre, le shintoïsme est une religion. Evidemment ça a l'air pas très malin de dire ça comme ça, car tout le monde le sait. Mais les choses qui semblent les plus évidentes ne le sont pas toujours, ce qui est d'autant plus vrai quand on observe une civilisation aussi différente que la nôtre. Pour semer la confusion dans les esprits, il suffit par exemple de se demander si le bouddhisme est une religion ou non. Ha ha !

Sans rentrer dans une querelle de mots inutile (qui a dit "rigueur" ?), disons donc que le shintoïsme est une religion puisqu'elle affirme l'existence d'un "ordre" (ou encore "esprits, concept, essence") "supérieur", "au-dessus" de l'être humain. Bref Dieu existe. Ou plutôt des divinités existent. Pour dire les choses de façon plus savante, le shintoïsme est une religion polythéiste. Et "poly" mérite bien sa place puisque c'est pas une petite brochette de dieux dont on a affaire mais une très grande foultitude ! Chaque "objet" ou même "concept" susceptible d'être un peu mystérieux (une pierre), un peu puissant (la montagne, ou même certains hommes), un peu craint parfois (des insectes, ou la maladie en général), etc. bref tout ce qui suscite une attention particulière peut-être élevé au rang de ce qu'on appelle un Kami, c'est à dire une sorte de divinité. Alors oui ça fait du monde tout ça, plusieurs millions peut-être !



La photo ci-dessus montre l'autel (dans le temple principal) au centre duquel doit se trouver un Kami. Je n'ai pas pu y accéder car, Kami soit loué, je ne suis pas un prêtre shintoïste. Vous noterez aussi sur cette photo le mode d'emploi qui indique comment faire une courbette correcte devant le Kami.

Alors la question subsidiaire est : Est-ce que c'est intéressant de savoir tout ça ? Certes, c'est curieux et beau mais encore ?

Et bien comme la religion chrétienne a sûrement marqué la religion occidentale, la comparaison entre le shintoïsme et la mentalité japonaise est à mon avis très étonnante ! Car si les Kamis sont partout, en particulier dans la nature, cela suggère donc aux adeptes d'une part d'être en communion avec la nature et d'autre part d'accorder une importance considérable au monde extérieur, c'est à dire aussi "au groupe" (quitte à ce que cela soit au détriment de soi-même ?).

Le moins que l'on puisse dire, c'est que le contraste avec l'occident est de ce point de vue frappant. Même si les Lumières (entre autres) ont évidemment joué un rôle plus que majeur dans le développement de la liberté individuelle en Occident, peut-être aussi que l'on peut comparer le shintoïsme avec le christianisme. Le christianisme pourrait ainsi apparaître comme une religion plus "individuelle" (une relation entre un dieu et chaque homme), où la nature est non pas placée à un rang supérieur - à respecter - mais plutôt comme une sorte de cadeau pour l'homme ? Ces sujets étant tabous, je me garde de porter le moindre jugement et ne fais que poser ces quelques questions. Libre à chacun de penser que je raconte n'importe quoi ce qui n'est sûrement pas tout à fait faux.

Autre "détail" majeur, le shintoïsme prône aussi de façon extrêmement forte le respect des ancêtres. Même s'il ne faut pas confondre "ancêtres" et "anciens", on peut quand même y voir là une origine de la relation particulière qu'entretiennent les japonais par rapport à leurs aînés, sujet d'ailleurs d'actualité à l'approche du Lundi de Pentecôte.

Enfin, la dernière (mais pas des moindres) grande particularité du shintoïsme est son caractère à l'opposé du manichéen. Si dans notre référentiel chrétien le divin oppose de façon nette et précise le bien (le paradis) au mal (l'enfer), il n'en est pas du tout de même des Kamis. Certes certains Kamis représentent plus que d'autres des concepts "négatifs", à la manière des insectes responsables de la destruction de cultures. Mais même la pire crapule des Kamis revêt aussi certaines facettes plus "positives", tout dépend de la situation et du point de vue.

Inversement, il est plutôt conseillé de faire preuve de prudence vis à vis n'importe quel Kami !! Ainsi, lorsque l'on pénètre dans un lieu où se trouve un Kami, il faut préalablement se purifier sous peine de courir un véritable danger. Pour citer Laspales et Chevalier : "Y'en a qui ont essayé ! Ils ont eu des problèmes !". Contrairement à la présentation que j'en fais, ces consignes de prudence ne sont pas du tout imposées, ni proclamées par quiconque sous le ton de la menace semant la crainte parmi les fidèles. Néanmoins chaque visiteur, par croyance ou plus probablement par tradition voire par superstition ou par amusement, se soumet bien volontiers à ce rituel.



Comme indiqué ci-dessus, la purification consiste à prélever de l'eau avec une cuillère, et à se mouiller les lèvres et les doigts.

Sans transition, avez-vous vu "Le Voyage de Chihiro" ? Pour ceux qui ne connaissent pas, il s'agit d'un dessin animé pour adultes réalisé par Hayao Miyazaki que je vous recommande. Ceux qui connaissent s'amuseront à comparer ce film avec ce que j'ai écrit ici. En effet, il y est décrit exactement cette histoire où des gens entrent de façon imprudente dans le monde des Kamis... et ils ont eu des problèmes ! De plus, vous souvenez-vous de ce monstre noir, glouton et terrifiant dans un premier temps mais qui affichera plus tard un caractère doux et attachant ? A la lumière de ces quelques lignes sur le shintoïsme, on comprend mieux ce qui a inspiré ce personnage qui apparaît comme tantôt bon, tantôt mauvais.

Prudence à nous donc chers lecteurs. Ainsi, plutôt que de nous dire au-revoir entre nous qui ne sommes que des humains, faisons preuve d'humilité et saluons respectueusement les deux chiens que j'ai oublié de vous présenter à l'entrée : ils sont les gardiens du temple ! On les retrouve toujours dans les sanctuaires shintoïstes :



Je suis d'accord avec vous, ils ressemblent plus à des lions. Mais ce sont des chiens. Systématiquement, l'un d'entre eux a la gueule fermée, et l'autre à la gueule ouverte. Comme vous vous en doutez, ces attitudes cachent certains symboles, c'est pas vraiment comme mon chien qui pouvait rester planté pendant des heures sous un prunier la gueule ouverte en attendant que ça tombe. Enfin celui là il ressemblait pas à un lion mais à une vache. Ceci dit une telle patience a aussi suscité une certaine forme d'admiration.

Avec ces chiens, tout se complique un peu, donc je vous laisse vérifier par vous même ce que je raconte à leur sujet. Bien que ces chiens gardent systématiquement les sanctuaires shintoïstes, leur origine est chinoise et ce sont des animaux associés (je crois) au Bouddhisme. L'un d'entre eux semble en effet prononcer "A" et l'autre "M". A la manière de l'Alpha de l'Oméga, "A" et "M" représentent respectivement la création / la vie d'une part et "la fin" / "la destruction" d'autre part. D'autres explications disent que ces lettres se rapprochent de "A-U-M" dans l'hindouisme (j'avais prévenu que c'était pas facile à suivre !), que l'on a décidé de prononcé "Ommmmm" en Occident. Les plus cultivés d'entre vous sauront relier cette anecdote aux Chevaliers du Zodiaque du Club Dorothée.

J'espère en tout cas que ce petit détour vous a plu. La dernière photo de cet article résume bien je pense le fait que ces histoires semblent certes venues d'un autre temps, mais résonnent encore étrangement dans le Japon moderne.

vendredi 21 mai 2010

Sanda samba

Oué oué je sais je suis à la bourre ça va non mais oh. Promis ça ne se reproduira plus. Enfin si, ça se reproduira je pense ^^. La vraie raison, c'est que le rythme de travail est élevé. J'ai passé une semaine de folie au labo et ai établi un record personnel en étant resté mercredi jusqu'à 22h (et je suis pas parti en dernier) ! Je pense donc que ça sera plus facile pour moi de rédiger les samedis, d'ailleurs si vous avez le numéro de téléphone de Bernard Thibault ça pourrait m'intéresser. Mais la fausse raison est plus amusante donc je vais m'y attarder un peu. Je l'avais jamais sortie auparavant celle excuse-là. Et pourtant c'est une histoire vraie qui commence de façon très classique : une difficulté à trouver le sommeil la nuit dernière. La faute à un bruit étrange, et surtout répétitif. Au début je croyais que c'était voisin qui avait lancé une machine. De toutes façons, c'est bien connu, c'est toujours la faute du voisin.

Mais au fur et à mesure que le temps passe, le bruit s'intensifie, un bruit sourd, vibrant et surtout très chiant bordel. A tel point qu'après cette phase de grognements et d'accusations en tous genres, je finis par me demander si le souci ne vient pas de chez moi. Je fais donc une première ronde (oh j'exagère, mon appart n'est pas si grand que ça, je dis juste ça pour faire chier les parigots qui me lisent), pour vérifier que j'ai pas un truc qui s'emballe. Non, rien d'inhabituel, tout est bien rangé de façon aléatoire comme d'habitude. Re-tentative de dodo donc, mais même si toutes les machines à laver finissent par s'éteindre, mon fameux bruit ne semble pas vouloir me laisser tranquille. En bon chercheur que je suis, j'émets donc une deuxième hypothèse à savoir le vent qui fait vibrer quelque chose dans mon balcon. C'était pas si improbable vu que les tempêtes locales valent bien celles de la côte Atlantique. Me voilà donc parti pour un tour au balcon en pleine nuit.



Et là, la scène valait sûrement d'être filmée. Pour vous donner une petite idée, c'était un peu comme quand on rentre dans une discothèque. La porte était à peine ouverte que j'ai pris un petit nuage de fumée dans la figure : un brouillard comme j'en ai très rarement vu !! C'est simple, je voyais même pas la rambarde du balcon qui était à 2 mètres. Il faisait aussi assez chaud et très lourd, un peu comme au temps glorieux de la Pitxuri. Et dans le rôle du disc-jockey, responsable de ce boucan scandaleux : des animaux qui se sentaient en forme. Je ne les ai pas identifiés de suite... Leur cri était comme un son très grave qui était soufflé, c'étais presque effrayant dans un tel contexte ! Je n'ai résolu l'énigme qu'en demandant la réponse à mes collègues. Ca aussi c'est de la déformation professionnelle. Le chanteur nocturne de heavy métal de Sanda est donc..... roulement de tambour .... "la grenouille-mugissante" !!!

Certains diront peut-être que j'exagère. Je me permets donc de citer une source objective à savoir Wikipedia : "Ils produisent un appel grave et sonore qui peut s'apparenter au beuglement d'un taureau."... Oui, c'était exactement comme ça.

L'ambiance musicale est donc plantée, et elle va le rester pendant un petit moment puisque le week-end dernier, il y avait un grand festival à Kobe !! Ce festival était une sorte de grande parade dans les rues de la ville avec des danses, des percussions, des costumes, des militaires (bouuuhhhh) etc. Mais surtout il y avait beaucoup de danses brésiliennes, car Kobe est jumelée avec Rio de Janeiro !



Les danseuses sont japonaises comme on peut le voir sur cette photo, ce qui n'est pas surprenant au fond car le japon cultive ce paradoxe d'être un pays réputé pour être un peu fermé (c'est beaucoup moins vrai à l'heure actuelle, enfin c'est mon opinion personnelle), mais de tous temps fasciné par les cultures étrangères. Remarquez sur la photo que les danseuses se sont frisées les cheveux pour l'occasion.

Evidemment un tel défilé constitue un moment idéal pour prendre quelques clichés. D'abord je voudrais vous montrer qu'il y avait beaucoup d'enfants et de personnes âgées qui paradaient. Les autres travaillent de toutes manières, sauf les militaires si vous avez bien suivi.






Mais s'il existe toujours des surprises dans chaque catégorie, il y a aussi les vrais champions toutes catégories confondues. Voici le vainqueur du Kobe Matsuri Festival 2010 :



A ce moment de mon récit, je suis confronté à un petit souci. J'envisageais initialement de vous faire un petit compte rendu du musée de Kobe, qui présente vraiment des choses intéressantes sur l'histoire de la ville. Mais comprenez qu'après le récit de la grenouille mugissante et du frère caché du commandant Cousteau, ça ferait mauvais genre.

Je garde donc ça au chaud pour la prochaine fois. Pour conclure en couleurs, je préfère reprendre un thème que j'avais mis entre parenthèses ces derniers temps, celui du Japon en fleurs. Surinformé sur les cerisiers avant mon arrivée, j'imaginais que le pays aurait été bien pâlichon une fois que toutes les pétales étaient tombées. Que nenni ! D'autres belles plantes ont pris le relais. Les allées de Sanda sont en ce moment même parsemées de rose et de blanc.



Celles-ci sont pour vous chers lecteurs et surtout chères lectrices. Je pense bien à vous !

vendredi 14 mai 2010

A la santé du Samouraï

"Le client est roi, le barman est dieu". Je sais pas pourquoi je me rappelle de cette profonde citation. Mais toujours est-il qu'aujourd'hui je compte mettre temporairement Mister Uesugi et compagnie en veilleuse pour vous causer de picole. A défaut d'être spirituel, soyons spiritueux ! Ouééééééééé. Ca tombe bien dans un mois y'aura du foot, c'est le bon moment pour s'échauffer la gorge. Tous ensemble chantons en choeur : "Makoto, bien que bonne bouddhiste fut baptisée avec du saké...." ! Commençons par la catégorie poids plume, les distributeurs de boissons non alcoolisées :



Alors j'entends déjà les remarques : "bouuh c'est nul, c'est juste un distributeur, c'est quoi ce blog ?". Certes je reconnais que l'intérêt de cet objet est très relatif, mais si je m'y attarde, c'est que j'en croise en permanence. Au début on ne les remarque pas, mais on finit par en trouver tellement, y compris dans des endroits complètement paumés ou inattendus, que ça en devient amusant. C'est un peu comme les jeux débiles des magazines télé ou il faut trouver où se cache Pinpin. S'il y en a autant, c'est que ça marche bien sûr. Certains auront peut-être relevé un petit détail sur la photo ci-dessus : il n'y a pas de coca (même si la photo est petite, on l'aurait reconnu). En général, dans ces distributeurs, il y a quelques jus de fruit, mais surtout du thé (en général du thé vert) qui se décline en de multiples variétés. Par exemple, toujours sur la même photo, le distributeur de gauche ne vend que du thé !

Passons désormais à la catégorie poids-coq, cocorico, catégorie où figure évidemment le vin. Car en dépit de leur climat, les japonais aussi essaient d'en fabriquer.



J'offre un verre à celui qui saura traduire l'étiquette.

Loin de moi l'idée de porter quelconque jugement de valeur, mais quand je dis "essayer", cela sous-entend que c'est pas une réussite. J'ai pu en "déguster" la semaine dernière à Yonezawa en visitant une cave. C'est certes gonflé de ma part de critiquer alors que j'ai tout testé : rouge, blanc, rosé (sans broncher d'ailleurs, comme quoi toutes ces années d'études m'auront finalement servi à quelque chose). Rien n'y fait, c'est en général un peu bizarre, sucré avec un goût de jus de fruit mais alcoolisé. On peut pas dire que c'est "mauvais" mais ça ressemble de très loin à du vin. Cependant l'ambiance était plutôt sympa puisqu'à côté de cette cave (qui est aussi une usine de conditionnement et musée du vin) était organisé un petit concert.

La photo ci-dessous montre qu'au moins, les japonais n'ont pas de leçon à recevoir en termes d'automatisation.



Après avoir snobé le pinard, j'ai quand même profité des réjouissances dehors.



Comme l'illustre cette photo, il y a beaucoup de charcuterie ici, avec une plus grande variété qu'en France (un peu comme en Allemagne peut-être ?). Dommage d'ailleurs que je comprenne toujours pas les Kanji, pour savoir un peu plus précisément ce que j'achète. Mais Yonezawa comme tout le nord du Japon est aussi reconnu pour son boeuf. Chabaaaal.

Enfin, concluons ce chapitre par le poids lourd : le saké.



On peut voir sur cette photo un vendeur qui porte quelque chose d'assez inédit, entre le costard et le kimono. Je suis pas un grand expert en saké donc vous m'excuserez mais ça va aller vite. Donc après avoir fait semblant de regarder dans l'ordre la couleur (ah non même pas c'est transparent) après avoir reniflé (mais le verre était trop petit pour y caler mon gros nez) et après avoir goûté d'un air entendu, ça avait effectivement le goût de saké. Et puis moi qui aime pas les alcools forts (cessez de rire au fond de la classe), le saké japonais, contrairement à son camarade chinois se boit comme du petit lait. Le degré d'alcool est à peu de chose près comme le vin : environ 14°. En ce qui concerne la synthèse, elle est plus systématique que celle du vin. Pour faire simple (mais c'est pas très loin de la réalité d'après ce que j'ai compris), la qualité d'un saké est essentiellement liée au polissage du riz. C'est pour ça qu'on dit que les japonais sont très polis. Rhoooo qu'est-ce qu'on se marre n'est-ce pas ? Sak(r)é moi.

Pour finir cet article de grande envergure, je voudrais terminer ce tour de table par quelque chose de peut-être plus sérieux, mais qui j'espère vous touchera. Je veux parler d'un cuisinier dont j'ai croisé la route pendant mes vacances à Yonezawa, lors d'une sortie au resto. Comme on l'a vérifié tout au long de la soirée et compte tenu de ce qu'il nous a raconté sur son parcours, c'est le genre de cuisinier qu'on qualifie à n'en pas douter de chef !! D'ailleurs c'est un passionné de cuisine française si bien que son restaurant est ... un resto français (ce qui ne fait que confirmer qu'il s'y connaît). Mais la particularité de son entreprise, c'est qu'il ne sert qu'une table par service. Il faut donc s'y prendre à l'avance pour en profiter ! C'est je pense un exemple extrême de celui qui privilégie la qualité à la quantité. Cette façon de faire lui permet d'avoir un contact très important avec les personnes qu'il reçoit, et aussi j'imagine d'avoir le temps d'apprécier sa passion. De ce que j'ai ressenti, et sans mauvais jeu de mot, c'est un choix qui semble porter ses fruits. D'ailleurs il a maintenant tellement de temps qu'il peut se consacrer à d'autres activités personnelles, en l'occurrence le jardinage. Bref c'est un artiste. Cet exemple serait-il - au moins en partie - exemplaire ? C'est sur cette belle histoire que je vais vous laisser aujourd'hui. Sayonara!! Hai !

vendredi 7 mai 2010

Carpe Diem

La scène se déroule dans le métro. Une jeune fille, probablement lycéenne, s'installe en face de moi. Tout dans son style faisait couleur locale, de la jupe très courte aux chaussettes remontées au niveau des mollets. La frange coupée nette de façon bien droite et les pointes des pieds tournées vers l'intérieur. Elle sort alors un petit paquet de nouilles et bien sûr les baguettes qui vont avec. C'est l'heure du goûter. Bref, si l'on en croit les apparences, je suis toujours au Japon.

Le métro quant à lui se dirige vers Osaka, où je dois prendre un bus de nuit qui m'amènera à Yonezawa, la ville où travaille Ruri. Je vais donc m'attarder aujourd'hui sur cette région assez particulière où j'ai passé 5 jours ! 5 jours ?!! Mais c'est bien plus que le minimum syndical japonais me direz-vous ! Certes, c'est une occasion très spéciale, qui correspond tout simplement à une succession de jours fériés. A cette période, c'est tout le Japon qui est en vacances en même temps, ce qui peut donner lieu à des bouchons assez fantastiques sur les routes. D'ailleurs, les japonais appellent ça la "Golden Week".

C'est donc au moins parti pour une golden nuit de plus de 10 heures de bus, car Yonezawa c'est loin !! Plus précisément, c'est toujours sur l'île principale du Japon (Honshu), mais bien au nord de Tokyo. Le climat est en général très froid, ce qui fait que j'ai encore profité des cerisiers en fleurs là-bas (alors que ça fait belle lurette que les arbres d'Osaka se sont dégarnis). Mais ya plus de saison ma pauv' Lucette ! Ainsi j'attrapé mes premiers coups de soleil tellement qu'il chauffait le Barnabé !



Outre les aléas météorologiques, l'autre particularité de Yonezawa (et peut-être de la préfecture correspondante qui est Yamagata) est son caractère "rural". Je mets des guillemets parce que tout est relatif, en particulier Wikipedia vient de me dire qu'il y a près de 100 000 habitants à Yonezawa. Mais il demeure vrai que cette région n'est pas comparable au Kanto (Tokyo et ses environs) ni au Kansai (Osaka). Rural ou pas, cette région est en tout cas très peu touristique, ce qui présente de réels avantages. D'ailleurs, je suis presque le seul de mon labo à m'y être rendu. Cela confirme la règle selon laquelle les étrangers visitent souvent plus un pays que les autochtones. Quoi qu'il en soit, les Yonezawaïens sont sûrement très peu habitués à voir des basques au teint clair, puisque je me suis fait interpellé à plusieurs reprises en me baladant en ville.

Quitte à passer pour un touriste, autant faire en sorte que cela soit justifié. Me voici donc rendu au principal lieu touristique à proximité qui est le Temple de Uesugi.



N'ayant pas fait mon catéchisme en version Shintoïste, je m'excuse par avance de la grande imprécision de mon récit. Mais de ce que j'ai compris, un des aspects du shintoïsme est d'associer à divers éléments de la nature (par exemple une pierre, un cours d'eau mais aussi un personnage important) un caractère sacré.
En l'occurrence, la star de la semaine était la carpe. Le "prêtre" dans la photo suivante est d'ailleurs peut être en train de célébrer ce noble animal.



Pour tout vous raconter, le 5 mai est en fait le jour des enfants et à cette occasion, on accroche des carpes en tissu dans les rues. Leur taille et leur couleur permet d'ailleurs de repérer s'il s'agit du père de la mère ou des enfants :



Des carpes, la fêtes des enfants, un temple shinto, tout ça donne un peu l'impression que ce blog part en banane. Pour vous donner un semblant de lien, la carpe symbolise le courage, la persévérance (comme la carpe qui remonte un cours d'eau), des valeurs qu'on ne peut que conseiller à des enfants tout simplement.

Pour les experts en carpe qui me lisent, il s'agit plus précisément de la carpe "Koï" que l'on retrouve très souvent dans les temps Shintoïsto-Bouddhiste. Et elles sont très jolies (avec des taches colorées sur leur peau) et tellement appréciées qu'elles se revendent à prix d'or !! Comme dirait Obélix, "Ils sont fous ces japonais".

Parallèlement à ces découvertes , j'ai fait aussi connaissance avec Uesugi dont je rappelle qu'il a donné son nom au temple présenté ici. Uesugi est un personnage tellement important à Yonezawa qu'il y est considéré comme proche du divin. Les qualités qui lui sont attribuées sont celles d'un excellent gestionnaire puisqu'il a amené la prospérité à cette région, et lui a permis de ne pas souffrir d'une famine qui a frappé le Japon.



Par ailleurs, à Yonezawa, un Uesugi peut en cacher un autre. Le deuxième Uesugi que je veux vous présenter (puisqu'il a été largement célébré dans la ville cette semaine) est un des samouraï les plus connus du Japon.

Je vous avais parlé la dernière fois de Tokugawa, l'unificateur du pays. L'action se situe cette fois-ci un peu avant. Le Japon est donc ... pas unifié du tout. Les pouvoirs locaux étaient très puissants et Uesugi était un des "gouverneurs locaux" les plus puissants du Japon (on appelait ça des Daimyo). Lors de mon bref passage, une célébration avait lieu à Yonezawa en la mémoire d'une bataille apparemment très importante, très longue, très sanguinolente j'imagine entre Uesugi et son grand rival (très connu lui aussi) : Takeda Shingen. Cette célébration était une véritable reconstitution, qui s'étalait sur deux jours. Le premier jour au soir, les différents chefs alliés à Uesugi se présentaient les uns après les autres et juraient fidélité tandis que la vraie bataille était représentée le lendemain. Il y a quelques siècles, ces deux grands nerveux se sont cependant affrontés pendant plusieurs années.



La version édulcorée à laquelle j'ai assistée était en tout cas plutôt jolie et intéressante dans la mesure où on s'imagine plus facilement ainsi le genre de boucheries festives qu'ils organisaient. Je plaisante à peine dans le côté esthétique de la chose. Même si la guerre est chose détestable, ces armées de Samouraïs et leurs cris sont hélas honteusement excitants. C'est même probablement fait pour.



L'heure est venue pour moi de conclure. Même si cette version de mon périple à Yonezawa n'est pas tout à fait complète, je préfère vous envoyer rapidement cet article tel quel, quitte à le compléter la semaine prochaine.

D'ici là je vous embrasse bien fort. A très bientôt pour de nouvelles surprises !